Interdiction d’utiliser des néonicotinoïdes dans les semences : annulation par le Conseil d’État des dérogations accordées pour les betteraves sucrières

Par un arrêt rendu le 19 janvier 2023, la CJUE a exclu le droit pour les États membres de déroger à l’interdiction européenne d’utiliser et de mettre sur le marché des semences traitées avec des produits phytopharmaceutiques contenant des néonicotinoïdes. Le Conseil d’État a donc annulé deux dérogations françaises accordées en 2021 et 2022 pour utiliser des néonicotinoïdes dans la culture de betteraves sucrières.

Depuis 2018, trois règlements européens (régl. UE 2018/783, 2018/784 et 2018/785) interdisent expressément l’usage de produits phytopharmaceutiques contenant les néonicotinoïdes suivantes : clothianidine, thiaméthoxame et imidaclopride. Ces substances sont en effet suspectées de contribuer au déclin de certaines populations d’insectes, dont les abeilles.

Concernant la mise sur le marché de produits phytosanitaires, l’article 53 du règlement européen (CE) no 1107/2009 du 21-10-2009 permet à un État membre d’accorder une dérogation temporaire afin d’utiliser un pesticide non homologué en Europe, s’il existe un risque grave pour l’agriculture et en l’absence d’autre solution.

De telles dérogations ont été accordées par la France en 2021 et 2022 pour l’utilisation de deux néonicotinoïdes (l’imidaclopride et le thiaméthoxame) pour les cultures de betteraves sucrières, alors que l’utilisation en agriculture de produits à base de néonicotinoïdes est interdite en France (et en Europe) depuis 2018. Ces dérogations, autorisant les semences traitées par ces pesticides, visaient à protéger les cultures d’infestations massives de pucerons porteurs de maladies.

Le 19 janvier dernier, la CJUE a jugé, pour la première fois, que lorsque la Commission européenne a expressément interdit, par un règlement d’exécution, l’utilisation de semences traitées avec un produit phytosanitaire donné, un État membre ne peut pas accorder de dérogation temporaire autorisant la mise sur le marché de ce produit en vue du traitement des semences ou l’utilisation de semences traitées à l’aide de ce produit.

Les dérogations accordées par la France en 2021 et 2022 ont donc été annulées par le Conseil d’État car jugées illégales au regard de la décision de la CJUE. Aucune dérogation n’est en effet possible si la Commission européenne a formellement interdit un pesticide.

 

CE 3-5-2023 n° 450155 ; CJUE 19-1-2023 n° C-162/21 

© Lefebvre Dalloz

 

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