Les droits sociaux naissent au jour de l’immatriculation de la société
Les droits sociaux naissent lors de l’immatriculation de la société et non à la signature des statuts, de sorte que les parts sociales souscrites par un époux ne constituent pas un bien commun susceptible de recel si la société est immatriculée après la prise d’effet du divorce.
Un époux marié sous le régime de la communauté universelle souscrit des parts d’une société civile immobilière (SCI) en formation par un apport en numéraire de fonds présumés communs alors que son divorce est en cours. Il dépose le 30 janvier le montant de son apport en numéraire sur un compte bancaire ouvert au nom de la société. Les statuts de la SCI sont signés le 10 février, le divorce prend effet le 27 et la SCI est immatriculée le 29.
Une cour d’appel condamne le mari pour avoir recelé les parts sociales reçues en contrepartie des apports. Pour ce faire, elle retient que les parts constituent des biens communs dès lors qu’elles ont été créées à la date de signature du contrat de société avant la dissolution de la communauté.
Censure de la Cour de cassation : les droits sociaux ne naissent pas lors de la conclusion du contrat de société mais à la date d’immatriculation de celle-ci, de sorte que les parts sociales nées avec l’immatriculation de la SCI intervenue après la dissolution de communauté ne constituaient pas un bien commun susceptible de recel.
À noter
C’est la première fois, à notre connaissance, que la Cour de cassation se prononce explicitement sur la date de naissance des droits sociaux. Ce n’est que lorsque la société acquiert la personnalité morale qu’elle dispose d’un patrimoine propre dont fait partie le capital social, qui est composé de la somme des apports réalisés par les associés. Or c’est bien l’immatriculation de la société qui permet à la société d’acquérir la personnalité morale (C. civ. art. 1842). Il en résulte que les droits sociaux, qui représentent des fractions du capital social attribuées aux associés en contrepartie de leurs apports, ne peuvent pas être émis avant l’immatriculation.
La première chambre civile de la Cour de cassation tire la conséquence logique de cette solution à propos du recel de communauté en refusant de considérer que les parts sociales qu’un époux détient dans une société immatriculée après son divorce constituent un bien susceptible de recel. En effet, le recel, défini à l’article 1477 du Code civil, doit avoir pour objet un bien commun (Cass. 1e civ. 17-6-2003 no 01-13.228).
Cass. 1e civ. 17-1-2024 no 22-11.303
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