Partage de la valeur : autres mesures relatives à l’intéressement et à la participation
Présentation des principales autres mesures concernant l’intéressement et la participation contenues dans la loi 2023-1107 du 29-11-2023 transposant l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise.
Mise en place de la participation en cas de franchissement du seuil de 50 salariés
Rappel. Pour déclencher l’obligation de mise en place de la participation, les effectifs de l’entreprise doivent avoir été égaux ou supérieurs à 50 salariés chaque année durant 5 ans consécutifs (C. trav. art. L 3322-1). Cependant, les entreprises ayant déjà conclu un accord d’intéressement et qui atteignaient le seuil de 50 salariés étaient dispensées de l’obligation de négocier un accord de participation pendant 3 ans après le franchissement de ce seuil, si l'accord était appliqué sans discontinuité pendant cette période (C. trav. art. L 3322-3). L’administration considérait que ce délai de report de 3 ans se cumulait avec le délai de droit commun de 5 ans. Pour une entreprise déjà dotée d’un accord d’intéressement appliqué sans discontinuité durant 3 ans qui franchissait le seuil de 50 salariés, l’assujettissement à la participation pouvait être décalé de 8 ans au total.
Exemple. Lorsque l’entreprise a un effectif égal ou supérieur à 50 salariés en 2020, 2021, 2022, 2023 et 2024, mais que l’exercice 2025 est couvert par un accord d’intéressement, conclu avant 2020 et renouvelé sans discontinuité - date à laquelle l’entreprise a franchi 50 salariés -, l’assujettissement à la participation peut être décalé de 8 ans au total. Cette entreprise sera effectivement soumise à la participation au titre de l’exercice 2028.
Suppression du report de 3 ans. Pour mettre fin à cette situation et accélérer la généralisation de la participation dans les entreprises d’au moins 50 salariés, le report de 3 ans en présence d’un accord d’intéressement appliqué sans discontinuité durant 3 ans est supprimé depuis le 1-12-2023, par l’abrogation de l’article L 3322-3 du Code du travail (Loi art. 7, I).
Maintien du report de 3 ans pour les entreprises déjà bénéficiaires. Cependant, les entreprises qui bénéficiaient de ce report de 3 ans avant le 1-12-2023 et qui ne sont tenues d’appliquer un régime de participation qu’à compter du 3e exercice clos après le franchissement du seuil de 50 salariés conservent le bénéfice de cette disposition jusqu’au terme du report (Loi art. 7, II).
Avances sur intéressement et participation
L’accord d’intéressement ou de participation pourra prévoir le versement, en cours d’exercice, d’avances sur les sommes dues au titre de l’intéressement ou de la réserve spéciale de participation aux salariés bénéficiaires. Ces avances seront versées au bénéficiaire, après avoir recueilli son accord, selon une périodicité qui ne pourra être inférieure au trimestre (Loi art. 12 ; C. trav. L 3348-1 nouveau).
Remboursement du trop-perçu. Lorsque les droits définitifs attribués au salarié bénéficiaire au titre de l’intéressement ou de la participation seront inférieurs à la somme des avances reçues, le trop-perçu sera intégralement reversé par le bénéficiaire à l’employeur sous la forme d’une retenue sur salaire (dans la limite de 1/10e du montant du salaire).
Si le trop-perçu a été affecté à un plan d’épargne salariale, il ne pourra pas être débloqué et constituera un versement volontaire du bénéficiaire qui n’ouvre pas droit aux exonérations fiscales et sociales applicables aux sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation (C. trav. art. L 3312-4, L 3315-1 à L 3315-3 et L 3325-1 à L. 3325-4).
Un décret doit encore déterminer les conditions d’information des bénéficiaires.
Non-substitution au salaire des sommes versées au titre de la participation
Exonérations fiscales et sociales applicables aux sommes versées au titre de la participation. Les sommes portées à la réserve spéciale de participation au cours d'un exercice sont déductibles pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ou de l'impôt sur le revenu exigible au titre de l'exercice au cours duquel elles sont réparties entre les salariés. Ces sommes n’ont pas le caractère d’élément de salaire pour l’application de la législation du travail et sont exclues de l’assiette des cotisations sociales pour les salariés, les salariés agricoles et les travailleurs indépendants non agricoles et agricoles (Loi art. 3 ; C. trav. art. L 3325-1).
Non-substitution au salaire. Depuis le 1-12-2023, la loi sur le partage de la valeur inscrit comme principe légal la non-substitution au salaire des sommes versées au titre de la participation aux résultats, principe déjà applicable à l’intéressement et à l’abondement au plan d’épargne entreprise.
Ainsi, les sommes versées au titre de la participation ne peuvent se substituer à aucun des éléments de rémunération (soumises aux cotisations sociales) qui sont en vigueur dans l’entreprise ou qui deviennent obligatoires en application de dispositions légales ou de clauses contractuelles.
Toutefois, si un élément de rémunération est supprimé totalement ou partiellement, cette règle de non-substitution ne peut pas avoir pour effet de remettre en cause les exonérations fiscales et sociales applicables aux sommes versées au titre de la participation, dès lors qu’un délai de 12 mois s’est écoulé entre le dernier versement de cet élément de rémunération et la date d’effet de l’accord de participation (Loi art. 3 ; C. trav. art. L 3325-1 al. 3 nouveau).
Légalisation de la rectification de la participation en cas de rectification du résultat fiscal
Depuis le 1-12-2023, le principe de rectification du montant de la participation en cas de rectification du résultat fiscal prévu par l’article D 3324-40 du Code du travail est inscrit dans la partie législative du Code du travail au nouvel article L 3326-1-1 du Code du travail (Loi art. 13).
L’article L 3326-1-1 du Code du travail prévoit désormais que lorsque la déclaration des résultats d'un exercice de l’entreprise est rectifiée par l'administration ou par le juge de l'impôt, que les rectifications donnent lieu ou non à l'application de majorations, à des poursuites pénales ou à une convention judiciaire d'intérêt public, le montant de la participation des salariés au bénéfice de cet exercice doit faire l'objet d'un nouveau calcul tenant compte des rectifications apportées.
Le montant de la réserve spéciale de participation est modifié en conséquence au cours de l'exercice pendant lequel les rectifications opérées par l'administration ou par le juge de l'impôt sont devenues définitives ou ont été formellement acceptées par l'entreprise. Ce montant est majoré d'un intérêt, dont le taux est égal au taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées (TMOP) et qui court à partir du premier jour du 6e mois de l'exercice qui suit celui au titre duquel les rectifications ont été opérées.
Sécuriser les accords d’intéressement prévoyant des primes plus favorables aux bas salaires
La répartition de l'intéressement entre les bénéficiaires peut être uniforme, proportionnelle à la durée de présence dans l'entreprise au cours de l'exercice ou proportionnelle aux salaires. L'accord peut également retenir conjointement ces différents critères (C. trav. art. L3314-5).
Depuis le 1-12-2023, lorsque l'accord d’intéressement prévoit une répartition de l'intéressement entre les bénéficiaires en fonction du salaire, il peut fixer un salaire plancher, un salaire plafond ou les deux, servant de base de calcul de la part individuelle (Loi art. 14 ; C. trav. art. L 3314-5, al. 2 nouveau).
Bon à savoir. Cette mesure vise à favoriser les salariés ayant un bas salaire en cas de répartition de la prime d’intéressement proportionnellement aux salaires, qui peuvent ainsi bénéficier d’une prime d’intéressement plus élevée, et à sécuriser les accords d’intéressement prévoyant déjà des primes plus élevées pour les bas salaires (étude d’impact p.105 et s.).
Condition d’ancienneté pour les intérimaires
Pour bénéficier des accords d'intéressement et de participation ou des plans d'épargne salariale, une condition d'ancienneté d’au plus 3 mois dans l'entreprise ou dans le groupe d'entreprises peut être exigée. Un salarié temporaire est réputé compter 3 mois d'ancienneté dans l'entreprise ou dans le groupe qui l'emploie s'il a été mis à la disposition d'entreprises utilisatrices pendant une durée totale d'au moins 60 jours au cours du dernier exercice (C. trav. art. L 3342-1 al. 2).
Depuis le 1-12-2023, un accord étendu de la branche professionnelle du travail temporaire peut, par dérogation, prévoir une durée d'ancienneté différente pour les salariés temporaires, dans la limite de 90 jours (Loi art. 16 ; C. trav. art. L 3342-1 al. 4 nouveau).
Source : Loi 2023-2023-1107 du 29-11-2023 transposant l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise art. 3, 7, 12, 13, 14 et 16, JO du 30.
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