Pas d’intérêts moratoires sur acomptes versés avant l’établissement de l’imposition

Les intérêts moratoires dus par l’administration en cas de dégrèvement contentieux prononcé à la suite d’une erreur dans l’assiette ou le calcul de l’impôt ne peuvent pas courir avant l’établissement de l’impôt en cause, indépendamment d’éventuels acomptes versés en application des règles de recouvrement.

En cas de dégrèvement prononcé par un tribunal ou par l’administration à la suite d’une réclamation portant sur une erreur commise dans l’assiette ou dans le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d’intérêts moratoires calculés à compter du jour du paiement des impositions concernées (LPF art. L 208).

En l’espèce, la cour administrative d’appel de Versailles a jugé qu’une société était fondée à solliciter le paiement d’intérêts moratoires complémentaires à raison d’une réduction de cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) obtenue au titre de 2014 et 2015 dans la mesure où, selon elle, les intérêts moratoires auxquels la contribuable avait droit couraient à compter du versement de chaque acompte au paiement duquel elle était tenue, au plus tard le 15 juin et le 15 septembre de l’année d’imposition.

Toutefois, le Conseil d’État considère qu’en statuant ainsi, la cour a commis une erreur de droit. Il précise qu’en cas de dégrèvement de CVAE, les intérêts ne peuvent pas courir à raison d’une période antérieure à la liquidation du solde de la cotisation et donc à compter du versement de chaque acompte. Il s’aligne ainsi sur la doctrine administrative (BOI-CTX-DG-20-50-30 nos 60 à 80) selon laquelle lorsque l'impôt dégrevé a donné lieu au paiement d'acomptes, le point de départ des intérêts moratoires se situe, au plus tôt, à la date de liquidation du solde de l'impôt.

Cette décision infirme la jurisprudence adoptée jusqu’à présent par les juges du fond qui procédaient à une application stricte de la lettre de l'article L 208 du LPF selon lequel les intérêts courent du jour du paiement, le versement d’un acompte provisionnel constituant un paiement (TA Melun 3-10-1999 n° 1703756 ; TA Montreuil 30-6-2020 n° 1903767, 1907448).

Attention. Si, en l’espèce, la solution concerne la CVAE qui sera supprimée à compter de 2024, elle conserve néanmoins un intérêt dans la mesure où elle est susceptible de concerner tous les autres impôts donnant lieu au versement d’acomptes, tels l’impôt sur les sociétés, la cotisation foncière des entreprises ou, encore, l’impôt sur le revenu.

CE 5-6-2023 n° 465559

© Lefebvre Dalloz

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