Recours pour excès de pouvoir possible contre une actualité du site Bofip

Les actualités du site Bofip peuvent faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.

Pour rappel, le Bulletin officiel des finances publiques-impôts (Bofip-impôts) regroupe l'ensemble des commentaires de la législation fiscale publiés en ligne par la Direction générale des finances publiques (DGFiP). Les actualisations de ces commentaires sont accompagnées d'un message d'information intitulé « actualité ».

L’Association pour un tourisme professionnel (ATOP), l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH) et les Groupement des hôtelleries et restaurations de France (GHR) ont demandé au Conseil d’État d’annuler l’actualité publiée le 14-2-2024 commentant la mise à jour du paragraphe 55 des commentaires administratifs publiés le même jour au Bofip sous la référence BOI-BIC-CHAMP-40-20. Par l’actualité attaquée, le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique avait fait part de son interprétation des modifications introduites à l’article 50-0 du CGI par les dispositions de l’article 45 de la loi de finances pour 2024, s’agissant notamment de l’application aux revenus issus de l’activité de location de locaux meublés de tourisme non classés réalisés au titre de l’année 2023, de l’abaissement du plafond de chiffre d’affaires applicable au régime des micro-entreprises et de l’abattement représentatif des charges.

Les documents de portée générale émanant d’autorités publiques, matérialisés ou non, tels que les circulaires, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif peuvent être déférés au juge de l’excès de pouvoir lorsqu’ils sont susceptibles d’avoir des effets notables sur les droits ou la situation d’autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de les mettre en œuvre. Ont notamment de tels effets ceux de ces documents qui ont un caractère impératif ou présentent le caractère de lignes directrices.

Le Conseil d’État considère que l’interprétation ici en cause est en effet susceptible de produire des effets notables sur la situation des personnes qui, ayant réalisé au titre de l’année 2023, des activités entrant dans le champ d’application de l’article 50-0 du CGI, pourraient faire le choix de ne pas appliquer, pour la déclaration desdits revenus, les dispositions en vigueur depuis le 31-12-2023. Cette interprétation émanant des services chargés d’établir l’assiette de l’imposition ne se borne pas à renvoyer sans s’y substituer aux commentaires de la loi fiscale publiés sous la référence BOI-BIC-CHAMP-40-20. Le recours dirigé contre elle est donc recevable.

À noter. Par cette décision, le Conseil d’État revient sur sa position antérieure selon laquelle il refusait toute possibilité de recours pour excès de pouvoir à une actualité du site Bofip en ce qu’elle ne contient, par elle-même, aucune disposition impérative à caractère général (CE 26-4-2018 nos 417809, 418030, 418031, 418032 et 418033). Il soulignait alors que l'information donnée sous cet intitulé sur le portail internet de la DGFiP avait pour seul objet d'informer les contribuables de modifications ou de mises à jour intervenues dans des commentaires administratifs publiés au Bofip-impôts, dont les références sont indiquées et qui sont rendues accessibles au moyen d'un lien hypertexte.

Cette décision offre de nouvelles opportunités de recours pour les contribuables et s’inscrit dans la lignée d’une tendance amorcée l’an dernier à l’égard du droit dit « souple » : le

Conseil d’État avait en effet admis qu’une réponse donnée par le ministère de l'économie, des finances et de la relance dans le cadre d’une foire aux questions (FAQ) puisse faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir (CE 3-2-2023 n° 451052).

 

CE 8-7-2024 nos 492382 et 492582.

© Lefebvre Dalloz

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