Et si votre entreprise attribuait des actions gratuites?

Outil de motivation et de fidélisation des salariés et des mandataires sociaux, le dispositif d’attribution gratuite d’actions a été amélioré par la loi Macron afin de le rendre plus attractif.Son régime fiscal a toutefois été fortement durci par la loi de finances pour 2017 pour les gains excédant 300 000 €.

Quelles sociétés ?

Seules les sociétés par actions (SA, SAS et SCA), cotées ou non, peuvent attribuer gratuitement des actions à leurs salariés ou à leurs dirigeants ou à ceux des sociétés qui leur sont liées.

Quels bénéficiaires ?

Les salariés

L’assemblée générale extraordinaire(AGE) d’une société par actions peut autoriser l’attribution d’actions gratuites en faveur de l’ensemble du personnel salarié ou, le cas échéant, de certaines catégories seulement de celui-ci, selon des critères fixés par le conseil d’administration ou le directoire.

Dans ce dernier cas, il est possible de se référer aux catégories retenues en droit du travail (ouvriers, employés, agents de maîtrise, ingénieurs et cadres).

D’autres catégories s’inspirant des usages (constants, généraux et fixes) ou des accords collectifs en vigueur dans la profession ou l’entreprise peuvent être retenues, si elles sont déterminées à partir de critères objectifs, non restrictifs et clairement définis.

S’agissant de salariés de sociétés liées, une société non cotée peut attribuer des actions gratuites aux membres du personnel salarié des sociétés ou des groupements d’intérêt économique dont elle détient, directement ou indirectement, 10% au moins du capital ou des droits de vote (sociétés filiales).

Les dirigeants et mandataires sociaux

Le président du conseil d’administration, le directeur général, les directeurs généraux délégués, les membres du directoire ou le gérant d’une société en commandite par actions peuvent se voir attribuer des actions de la société dans les mêmes conditions que les membres du personnel salarié.

Les présidents de SAS, personnes physiques, peuvent également être attributaires d’actions gratuites.

Des conditions sont toutefois à respecter pour les dirigeants bénéficiaires :

– seules les personnes physiques ayant des fonctions de direction peuvent en effet bénéficier de l’attribution d’actions gratuites ;

– les administrateurs ou les membres du conseil de surveillance ne peuvent en bénéficier, sauf s’ils cumulent un mandat social et un contrat de travail. Les intéressés peuvent, dans ce cas, se voir attribuer des actions gratuites au titre de leur activité salariée.

Les mandataires sociaux éligibles peuvent également se voir attribuer des actions d’une société liée, sous réserve que les actions de cette dernière soient admises aux négociations sur un marché réglementé.

Limites individuelles de détention

Il ne peut pas être attribué d’actions gratuites aux salariés et aux mandataires sociaux détenant chacun plus de 10% du capital social. En outre, une attribution d’actions gratuites ne peut avoir pour effet que les intéressés détiennent chacun plus de 10% du capital social.

Comment procéder en pratique?

Caractéristiques de l’attribution des actions gratuites

Les actions attribuées peuvent être des actions existantes ou à émettre.

Les actions attribuées doivent présenter un réel risque en capital. En outre, le rendement du titre doit avoir un caractère aléatoire.Ces actions peuvent être des actions de préférence, dès lors qu’elles remplissent les conditions ci-dessus.

Modalités d’attribution des actions gratuites

Autorisation préalable de l’AGE

L’attribution d’actions gratuites par le conseil d’administration ou le directoire procède d’une autorisation donnée par l’AGE, sur rapport du conseil d’administration ou du directoire, selon le cas, et sur le rapport spécial des commissaires aux comptes.

L’autorisation comporte la désignation des bénéficiaires de l’attribution, fixe le pourcentage maximal du capital social pouvant être attribué, les durées minimales des périodes d’acquisition et de conservation.

La durée de l’autorisation permettant d’attribuer des actions gratuites est fixée par l’AGE. Elle ne peut excéder 38 mois.

Décision d’attribution

Cette décision appartient au conseil d’administration ou, selon le cas, au directoire.

Pour les sociétés qui en sont dépourvues, notamment pour les SAS, cette décision doit être prise par un organe habilité équivalent : le président ou les dirigeants désignés par les statuts.

Le conseil d’administration ou le directoire fixe les conditions et, le cas échéant, les critères d’attribution des actions.

La fixation des conditions peut se limiter à la détermination de la durée des périodes d’acquisition et de conservation des actions par les bénéficiaires.

L’organe exécutif peut fixer des conditions supplémentaires et des critères d’attribution. Par exemple, les actions peuvent être acquises sous condition d’ancienneté, c’est-à-dire que leur acquisition sera définitive quand le bénéficiaire aura atteint l’ancienneté exigée.Pour autant, le bénéficiaire des actions ne pourra en être véritablement propriétaire qu’au terme de la période d’acquisition, et ce, même si la condition liée à l’ancienneté est remplie avant son échéance.

Il peut être également prévu des conditions relatives à la présence dans l’entreprise des bénéficiaires au terme de la période d’acquisition.Quant aux critères, ceux-ci peuvent être, par exemple, liés à la performance appréciée soit au niveau individuel, soit au niveau de l’entreprise.

Limites d’attribution

Le nombre total des actions gratuites attribuées ne peut pas excéder 10% du capital social de la société attributrice.

Ce seuil est porté à 30% lorsque l’attribution bénéficie à l’ensemble des membres du personnel salarié de la société.

Au-delà du pourcentage de 10%, l’écart entre le nombre d’actions distribuées à chaque salarié ne peut toutefois pas être supérieur à un rapport de 1 à 5.

Dans les sociétés non cotées, les statuts peuvent prévoir un pourcentage plus élevé dans le cas d’attributions d’actions gratuites à certaines catégories des membres du personnel salarié de la société uniquement, qui ne peut toutefois excéder 15% du capital social à la date de la décision d’attribution des actions par le conseil d’administration ou le directoire dans les sociétés non cotées.Une fois le seuil maximal atteint, le conseil d’administration ou le directoire ne peut plus attribuer d’actions gratuites. 

Cela étant, il est procédé à une nouvelle appréciation du pourcentage d’attributions d’actions gratuites par la société en cas d’augmentation ou de réduction de capital.

Période d’indisponibilité des actions

Les bénéficiaires ne deviennent propriétaires des actions qui leur sont attribuées qu’au terme d’une période d’acquisition d’un an (au lieu de 2 ans depuis la loi Macron) et ne peuvent pleinement en disposer qu’à l’issue, le cas échéant, d’une période minimale de conservation, à condition que la durée cumulée des périodes d’acquisition et de conservation des actions soit au moins égale à 2 ans.Depuis la loi Macron, l’AGE n’est pas tenue de prévoir une période minimale de conservation, cette dernière étant devenue facultative.

Des dérogations aux délais d’acquisition et de conservation sont toutefois prévues, notamment en cas de décès ou d’invalidité.A noter que pour les dirigeants, le conseil d’administration ou de surveillance doit étendre la durée de la période de conservation des actions : soit en décidant qu’elles ne peuvent être cédées par les intéressés avant la cessation de leurs fonctions, soit en fixant la quantité de ces actions qu’ils sont tenus de conserver au nominatif jusqu’à la cessation de leurs fonctions.

Quelle fiscalité pour les entreprises ?

Une contribution patronale spécifique

L’entreprise attributrice d’actions gratuites est redevable d’une contribution patronale sur le gain d’acquisition (quelle que soit sa valeur) dont le taux est fixé à 30 % pour les actions gratuites dont l’attribution a été autorisée par une décision de l’AGE postérieure au 30-12-2016(20 % pour les décisions d’AGE antérieures au 30-12-2016).

Elle est exigible le mois suivant la date d’acquisition des actions par le bénéficiaire.

Sauf pour certaines PME

Les PME (moins de 250 personnes, chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 50 millions d’euros ou total du bilan annuel n’excédant pas 43 millions d’euros) n’ayant procédé à aucune distribution de dividendes depuis leur création sont exonérées de cette contribution patronale dans la limite, par salarié, du plafond annuel de la sécurité sociale (39228 € en 2017).

Quelle fiscalité pour les bénéficiaires ?

Au niveau fiscal

Jusqu’en 2016, l’avantage tiré de l’attribution gratuite des actions était imposé comme une plus-value de cession mobilière.

Pour les actions gratuites dont l’attribution a été autorisée par une décision de l’AGE postérieure au 30-12-2016, un nouveau régime du gain d’acquisition a été mis en place.

– Jusqu’à 300000 €

Le gain d’acquisition ou la fraction des gains d’acquisition qui n’excède pas 300000 € reste imposé selon le barème progressif de l’impôt sur le revenu après application, le cas échéant, des abattements pour durée de détention prévus pour l’imposition des plus-values sur valeurs mobilières.

Le gain est soumis à la CSG et à la CRDS ainsi qu’aux prélèvements sociaux applicables aux revenus du patrimoine, soit au taux global de 15,5%.

– Au-dessus de 300000 €

La fraction des gains d’acquisition qui excède 300000 € est désormais soumise à l’impôt sur le revenu comme un salaire, selon le barème progressif, sans application d’aucun abattement pour durée de détention.

Cette fraction est soumise à la CSG et à la CRDS, aux taux applicables aux revenus d’activité, soit au taux global de 8%.

Au niveau social

La contribution salariale de 10% sur le gain d’acquisition avait été supprimée par la loi Macron. Elle est réintroduite à partir de 300000 € en 2017!

Ainsi, pour les actions gratuites dont l’attribution a été autorisée par une décision de l’AGE postérieure au 30-12-2016, la fraction des gains d’acquisition qui excède la limite annuelle de 300 000 € est assujettie à la contribution salariale spécifique de 10%.

Le gain d’acquisition ou la fraction du gain d’acquisition qui n’excède pas 300000 € reste, en revanche, exempté de cette contribution.

A noter : Obligations déclaratives

– Au titre de l’année d’attribution des actions gratuites L’employeur doit notifier à son organisme de recouvrement l’identité des salariés ou mandataires sociaux auxquels des actions ont été attribuées au cours de l’année civile précédente, ainsi que le nombre et la valeur des actions attribuées à chacun d’entre eux. A défaut, l’employeur est tenu au paiement de la totalité des cotisations sociales, y compris pour leur part salariale.

– Au titre de l’année d’acquisition définitive La société doit délivrer au bénéficiaire au plus tard le 1er mars de l’année suivante un état individuel mentionnant certaines informations (entre autres, le nombre d’actions acquises et leur valeur unitaire à la date d’acquisition définitive) et transmettre ces mêmes informations à l’administration fiscale.

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